[
Français
]
Protéger le logiciel libre et traduction en
Français de la GNU GPL
Protéger le Logiciel Libre
Ce document présente la vision et l'action de la FSF France, et
notamment son action dans le cadre de la traduction/adaptation de la
GNU GPL en français.
La vision et l'action de la FSF France
La Free Software
Foundation (FSF, Fondation pour le Logiciel Libre) et la
GNU General Public
License (GNU GPL, Licence Publique Générale GNU) sont en
grande partie l'épine dorsale du Logiciel Libre. La GNU GPL et la GNU
Lesser General Publique
License (GNU LGPL, Licence Publique Générale Amoindrie) sont les
licences principales utilisées pour le Logiciel Libre ; et pas
uniquement à l'intérieur du projet GNU.
Une des causes principales de cette situation est due à leur équilibre
savamment élaboré entre la défense de la liberté individuelle et celle
de l'intérêt général. Elles ne délivrent pas seulement les quatre libertés
fondamentales, elles les protègent également.
Issues des États-Unis, elles y ont été formulées de manière fortement
dépendante du cadre de la convention de Berne et de la loi
Américaine. Les systèmes juridiques comportant des différences
significatives entre les différents pays du monde, il existe des
décalages et des situations périlleuses qui rendent le Logiciel Libre
plus faible qu'il ne devrait l'être.
Les licences GNU (L)GPL devraient être sécurisées autant que possible,
en particulier dans les pays ayant une activité forte en matière de
Logiciel Libre. Puisque la plupart des pays Européens ont
signé la convention de Berne, nous sommes dans une situation
favorable. Protéger les licences GNU (L)GPL n'est qu'une question
d'utilisation des bonnes langues et formalismes juridiques ; il n'y a
pas besoin de réviser ou de modifier les concepts et les bases de ces
licences.
Seul un bon juriste avec une forte compréhension de la législation en
matière de droits d'auteur (copyright) peut effectuer ce
travail. Cela requiert de plus qu'il ou elle connaisse et favorise le
Logiciel Libre pour que l'esprit de la licence reste inchangé. Il sera
aussi nécessaire de travailler de façon étroite avec Richard M. Stallman (fondateur et
président de la FSF) et le Professeur Eben Moglen (professeur de
droit à l'université de Columbia, avocat général de la FSF et coauteur
de la GNU GPL) pour s'assurer que l'esprit originel de la GPL est
conservé.
Toutes les activités juridiques devraient être liées et coordonnées à
un niveau Européen. Cependant, les lois nationales sont encore assez
différentes en Europe, donc le travail réel devra être effectué à un
niveau local.
Les lois et les décisions potentiellement dangereuses pour le
Logiciel Libre seront également portées à la connaissance de la FSF(E)
plus tôt et pourront être modifiées/annulées de façon plus efficace.
Ce réseau juridique permettra de protéger le futur pour le Logiciel
Libre de façon bien plus efficace que nous n'avons pu le faire par le
passé.
La première action officielle concerne la traduction/adaptation en
Français de la GNU GPL. L'objectif étant d'avoir la GNU GPL en
Français compatible avec la GNU GPL en Anglais.
Traduction en Français de la GNU GPL
Historique du projet et problématique
À la suite d'une
conférence au Libre Software Meeting de Bordeaux en Juillet 2000,
Mélanie Clément-Fontaine a eu une discussion avec Richard M. Stallman
sur la nécessité d'adapter la licence GNU GPL au droit
Français. La discussion a continué ensuite par mail pour aboutir au
début de l'année 2001 à une demande de sa part. Celui-ci souhaitait
que Mélanie Clément-Fontaine se charge de l'adaptation au droit
Français. Ceci représente un changement d'attitude de la FSF qui
jusqu'à présent ne reconnaissait aucune traduction de la GNU GPL sur le
plan légal. Pour le moment, seul le projet de traduction en Français a
été accepté par la FSF. La transcription Française de la GPL sera
acceptée comme texte de référence.
L'APRIL a fourni un soutien
technique sur le front de la traduction. Mélanie Clément-Fontaine et
Benjamin Drieu ont commencé à travailler ensemble sur la base des
traductions existantes (celles notamment présentes sur Linux France et
celle de l'APRIL). Une traduction en Français mot à mot de la GNU GPL
ne suffit pas. Certains passages posaient des problèmes de
signification et la décision de les changer était assez importante
pour ne pas être décidée seuls. Le concours de Richard M. Stallman et
de Eben Moglen était nécessaire. Par chance, ceux-ci comprennent le
français, ce qui facilitera le travail.
L'une des difficultés est le fait que Mélanie Clément-Fontaine soit la
seule juriste Française à vraiment réfléchir au sujet. C'est
d'ailleurs une des raisons qui ont poussé la FSF France a commencer à
bâtir un réseau d'experts juridiques.
Une visibilité sur la version 3 de la GNU GPL s'avère nécessaire afin
d'éviter de perdre tout ou partie du travail d'adaptation.
La FSF France coordonne à
présent ce projet. Outre la mise en place des contacts avec d'autres
juristes, la FSF France fournit une aide logistique pour organiser les
réunions de travail regroupant les personnes ayant des compétences
juridiques pour tenter d'éclaircir un point précis. À ce sujet, les
deux sessions de travail qui auront lieu à l'occasion du Libre Software Meeting constitueront
une étape importante dans le processus, de part la présence physique
du professeur Eben Moglen. En plus, la FSF France pourra réutiliser
l'expérience acquise par le chapitre français pour les futures
traductions dans d'autres pays Européens.
État actuel
L'étape de création d'une version correcte de la GNU GPL en langage commun, compilée à partir des
traductions existantes, a été accomplie.
Les formules ayant un caractère juridique ont été identifiées et
il faut maintenant travailler sur chacune d'entre elles pour y apporter
les corrections propres au langage juridique.
Concernant la convention de Berne, sur laquelle la GNU GPL est fondée,
il faut rappeler que celle-ci ne lie que les États et non les
individus. Elle ne peut donc pas être invoquée par les individus. Elle
établit quelques règles qui organisent la réciprocité : une oeuvre
protégée par un état sera aussi protégée par la législation des autres
états. Ensuite, l'état édicte les règles qui lient les citoyens. Si
l'état n'édicte pas ces règles, il est coupable vis à vis des autres
États. Les États-Unis et la France sont signataires. Mais chaque état
peut établir des réserves. Par exemple, les États-Unis ont émis une
réserve sur l'article 6 bis qui touche au droit moral. L'étape de
transcription sous forme de règles propres à chaque État laisse place
à des interprétations qui rendent l'homogénéité de l'ensemble assez
aléatoire.
La convention de Berne (1886 et modifiée de nombreuses fois) est
très courte et le droit Français y correspond. Il s'agit d'adapter la
GNU GPL au droit français et non à la convention de Berne à laquelle
elle est déjà fidèle.
Un point délicat dans la GNU GPL est l'absence de précision sur
la loi et la juridiction compétente. Il est donc problématique de
déterminer quelle elles sont. Richard M. Stallman n'est pas favorable
à l'idée de les préciser dans la GNU GPL. C'est un point sur lequel
des discussions auront lieu.
Problématique de la traduction
Concernant la traduction, il a été décidé de ne pas repartir à
zéro. Les traductions de Nat Makarévitch et de Sophie Manoury qui ont été
faites pour Linux France et pour APRIL, ainsi que celle de Jean Méhat qui date de
1991 ont servi de base. Un différentiel entre ces différentes
traductions a montré que de nombreuses interprétations avaient été
faites et que des termes juridiques étaient incorrects.
Les meilleures portions de chacune d'elles ont
été agrégées. Il a été constaté que des passages étaient très
difficiles à traduire ou peu explicites.
Afin de clarifier ces points, ils ont dans un premier temps été
tous identifiés, ce qui a conduit à une série de questions destinées à
Richard Stallman et Eben Moglen.
Parmi les exemples de point de traduction délicat :
- La méta programmation.
- Dans la GNU GPL, il est question de
programmes qui génèrent des programmes (c'est le cas de bison
ou d'automake par exemple) cela laisse beaucoup à
l'interprétation des juristes. Pour un informaticien le
concept est familier mais un juriste le comprendra
différemment. Il a donc fallu trouver des termes et une
formulation qui soient compréhensibles à la fois par les juristes
et les développeurs. Nous faisons référence à ces phrases en
particulier:
The act of running the Program is not restricted, and
the output from the Program is covered only if its contents
constitute a work based on the Program (independent of having
been made by running the Program). Whether that is true
depends on what the Program does.
- L'utilisation du you
-
Elle a été problématique car pour un juriste français dire
"vous" a une signification différente. Nous avons envisagé
l'utilisation du terme "concessionnaire" pour régler ce
problème. C'est un point purement juridique.
- La limite de trois ans
-
Un point de détail apparaît dans le chapitre suivant:
b) Accompany it with a written offer, valid for at least three
years, to give any third party, for a charge no more than your
La période de trois ans est peut-être une limite
arbitraire, peut-être une référence à un point légal du
système juridique américain. C'est un point sur lequel une
question doit être posée à Richard Stallman et Eben Moglen.
Une des difficulté de traduction est liée au fait que la licence
GNU GPL est très riche conceptuellement, ce qui est une source de
difficultés. Un concept est introduit en très peu de mots et le
traduire en gardant fidèlement la sémantique du paragraphe s'avère
épineux.
- Le paragraphe concernant les brevets
-
Finally, any free program is threatened constantly by
software patents. We wish to avoid the danger that
redistributors of a free program will individually
obtain patent licenses, in effect making the program
proprietary. To prevent this, we have made it clear
that any patent must be licensed for everyone's free use
or not licensed at all.
Ce paragraphe est un point important qui est
collatéral à la licence, mais qui est essentiel à la
compréhension de la GNU GPL. Dans les traductions qui nous
ont servit de base, ce
paragraphe a été transcrit en usant des périphrases qui
affaiblissent ou perdent le sens original. Nous avons
préféré passer plusieurs heures à obtenir une traduction
fidèle plutôt que de se contenter d'une version
approximative sur le motif de la périphérie de ce sujet
à la licence.
- Définition du code source
-
Dans le paragraphe qui définit ce que signifie code source (il
commence par The source code for a work means the
preferred form of the work for making modifications to it.
For an executable work, complete source...) nous avons eu
des difficultés à établir ce qu'était "preferred form".
Dans le cas de bison par exemple le code généré est
parfaitement compréhensible mais ce n'est pas la forme
initiale ni la forme sur laquelle le développeur a
travaillé.
La GFDL contient une définition beaucoup plus
précise de ce que signifie le code source pour une
publication électronique, avec des
exemples. Peut-être parce que la problématique n'est pas la
même.
Atelier de travail à Bordeaux
À l'occasion du Libre Software
Meeting (Bordeaux, du 4 au 8 juillet 2001), dans le cadre du thème
"Droit,
économie, politique et logiciel libre", aura lieu un atelier
permettant à toutes les personnes impliquées dans l'effort de la
traduction/adaptation en français de la GNU GPL de se
rencontrer et de discuter.
La FSF France organise deux sessions de travail, le vendredi 6
juillet, sur la traduction/adaptation de la GNU GPL au droit français,
en présence notamment du professeur Eben Moglen, de Mélanie
Clément-Fontaine, de Benjamin Drieu, de Dan Ravicher (procureur
impliqué dans les aspects légaux du logiciel libre, voir son
interview sur Slashdot) et de membres du CNRS.
Intervenants
Eben Moglen a obtenu un PhD. en histoire et un J.D de
l'Université Yale. Moglen est actuellement professeur d'histoire
légale à l'École de Droit de l'Université Columbia et sert comme
conseiller général à la Free Software Foundation.
Richard Stallman est le fondateur du projet GNU lancé en 1984 afin de
développer le système d'exploitation libre GNU (acronyme pour « GNU is
Not Unix ») et par là-même pour rendre aux utilisateurs d'ordinateurs
la liberté que la plupart d'entre eux ont perdu. GNU est composés de Logiciels
Libres: quiconque est libre de les copier et de les redistribuer ainsi
que d'y apporter des changements, grands ou petits.
Aujourd'hui, des variantes du système GNU basées sur Linux, le noyau
développé par Linus Torvalds, sont utilisées largement. On évalue la
nombre d'utilisateur de GNU/Linux à 17 millions aujourd'hui. Ces
systèmes sont bien souvent appelé « Linux » de façon abusive; les
appeler « GNU/Linux » corrige cette erreur.
Richard Stallman a reçu le prix Hopper Award de l'Association for Computing
Machinery en 1991 pour le développement du premier éditeur Emacs dans
les années 70. En 1990, il fut honoré du MacArthur Foundation
fellowship et en 1996, d'un doctorat honorifique de l'Institut Royal
de Technologie en Suède. En 1998, il reçu le prix du Pionnier de
l'Electronic Frontier Foundation avec Linus Torvalds; en 1999 il se
vit décerner un prix du mémorial Yuri Rubinski.
Mélanie Clément-Fontaine est doctorante en droit de la propriété
intellectuelle et juriste de la société Alcôve. Elle est l'auteur d'une étude juridique de la licence Publique
Générale GNU, réalisée dans le cadre du DEA "Droit des créations
immatérielles" de l'Université Montpellier I (laboratoire CNRS ERCIM)
sous la direction du Professeur Michel Vivant.
Benjamin Drieu est Vice Président de l'association APRIL. Il contribue activement au
mouvement du Logiciel Libre depuis 1996. Il est notamment coauteur de
la publication collective "Libre enfants du savoir numérique" (2000)
et de "Configurer et installer un Logiciel Libre" inclus dans les
manuels de la distribution Mandrake depuis la version 7.0 (publié sous
GPL).
Références
|
|
|